Le Haut Karabakh est une région montagneuse du Caucase du Sud, peuplée majoritairement d’Arméniens, mais reconnue internationalement comme faisant partie de l’Azerbaïdjan. Depuis des décennies, ce territoire est au cœur d’un conflit sanglant entre les deux pays voisins, qui se sont affrontés à plusieurs reprises pour le contrôler. Le 19 septembre 2023, l’Azerbaïdjan a lancé une opération militaire d’envergure contre les forces arméniennes au Haut Karabakh, provoquant la mort de nombreux civils et la réaction de la communauté internationale. Quelles sont les origines de ce conflit ? Quels sont les enjeux actuels ? Quelles sont les perspectives de paix ?
Un conflit historique
Le Haut Karabakh, ou Artsakh en arménien, est une région historiquement peuplée d’Arméniens, qui ont été victimes d’un génocide perpétré par l’Empire ottoman entre 1915 et 1923. Après la Première Guerre mondiale, le Haut Karabakh fait partie de la République démocratique d’Azerbaïdjan, qui est ensuite intégrée à l’Union soviétique en 1922. Sous le régime communiste, le Haut Karabakh est rattaché à la République socialiste soviétique d’Azerbaïdjan, malgré les revendications des Arméniens qui demandent son rattachement à la République socialiste soviétique d’Arménie.
Voici une vidéo relatant cette nouvelle :
En 1988, les tensions s’exacerbent entre les deux communautés, et des affrontements éclatent entre les forces azerbaïdjanaises et les séparatistes arméniens, soutenus par l’Arménie. En 1991, après la chute de l’URSS, le Haut Karabakh proclame son indépendance, non reconnue par la communauté internationale. Une guerre éclate alors entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, qui fait plus de 30 000 morts et des centaines de milliers de déplacés. En 1994, un cessez-le-feu est signé sous l’égide du Groupe de Minsk, coprésidé par la France, la Russie et les États-Unis. Le Haut Karabakh reste sous le contrôle des forces arméniennes, ainsi que sept districts adjacents appartenant à l’Azerbaïdjan.
Une situation instable
Malgré le cessez-le-feu, la situation reste instable au Haut Karabakh, où des incidents armés se produisent régulièrement le long de la ligne de contact. Les négociations de paix entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie sont au point mort, chacun campant sur ses positions. L’Azerbaïdjan exige le retrait des forces arméniennes du Haut Karabakh et des territoires occupés, qu’il considère comme faisant partie intégrante de sa souveraineté territoriale. L’Arménie soutient le droit à l’autodétermination du peuple du Haut Karabakh, qui se considère comme une république indépendante. Le statut final du Haut Karabakh reste donc un sujet de discorde majeur entre les deux parties.
Une escalade militaire
Le 19 septembre 2023, l’Azerbaïdjan a lancé une opération militaire d’envergure contre les forces arméniennes au Haut Karabakh, qu’il qualifie d'”antiterroriste”. Selon Bakou, cette opération fait suite à la mort de quatre policiers et de deux civils azerbaïdjanais dans l’explosion de mines sur une route vers Choucha, ville du Karabakh sous contrôle azerbaïdjanais. L’armée azerbaïdjanaise affirme avoir pris le contrôle de plus de 60 positions des séparatistes arméniens, et avoir ciblé des infrastructures civiles et militaires à Stepanakert, la capitale du Haut Karabakh, et dans d’autres villes de la région.
Les autorités séparatistes arméniennes dénoncent une agression injustifiée et disproportionnée, et affirment résister aux assauts de l’ennemi. Elles font état de la mort d’au moins huit civils et de 80 blessés, dont des femmes, des personnes âgées et des enfants.
Une réaction internationale
L’opération militaire de l’Azerbaïdjan a suscité la réaction de la communauté internationale, qui appelle à la cessation immédiate des hostilités et au respect du cessez-le-feu. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, s’est dit “profondément préoccupé” par la situation au Haut Karabakh, et a exhorté les parties à “s’engager sans délai dans un dialogue constructif”. Le président français, Emmanuel Macron, a condamné “l’attaque” de l’Azerbaïdjan, et a appelé à “la reprise des négociations” sous l’égide du Groupe de Minsk.
Le président russe, Vladimir Poutine, a exprimé sa “sérieuse inquiétude” face à l’escalade militaire, et a appelé à “la restauration du statu quo”. Le président américain, Joe Biden, a déclaré que “les États-Unis sont prêts à aider à trouver une solution pacifique et durable au conflit”. La Turquie, alliée de l’Azerbaïdjan, a en revanche apporté son soutien à l’opération militaire de Bakou, et a accusé l’Arménie d’être “l’agresseur” dans le conflit.
Des enjeux stratégiques
Le conflit au Haut Karabakh revêt des enjeux stratégiques importants pour les acteurs régionaux et internationaux. Le Caucase du Sud est une région située à la croisée de l’Europe, de l’Asie et du Moyen-Orient, où transitent des oléoducs et des gazoducs reliant la mer Caspienne aux marchés européens. L’Azerbaïdjan est un pays riche en hydrocarbures, qui cherche à renforcer sa souveraineté territoriale et à diversifier ses partenariats économiques. L’Arménie est un pays enclavé et pauvre, qui dépend largement de la Russie pour sa sécurité et son énergie.
La Turquie est un acteur régional influent, qui cherche à étendre son influence dans son voisinage proche et à soutenir ses frères turcophones d’Azerbaïdjan. La Russie est un acteur historique dans le Caucase du Sud, qui cherche à préserver son rôle de médiateur dans le conflit et à maintenir son influence sur les deux parties. L’Union européenne est un acteur économique majeur dans la région, qui cherche à promouvoir la stabilité, la démocratie et les droits de l’homme.
Des perspectives de paix
Les perspectives de paix au Haut Karabakh sont incertaines, tant les positions des parties sont éloignées et les tensions sont vives. Le processus de négociation mené par le Groupe de Minsk n’a pas abouti à une solution politique durable au conflit. Les principes de base proposés par les médiateurs prévoient le retrait progressif des forces arméniennes des territoires occupés autour du Haut Karabakh, le retour des personnes déplacées, le déploiement d’une force de maintien de la paix internationale, le statut provisoire du Haut Karabakh garantissant sa sécurité et son autonomie, ainsi qu’un référendum sur son statut final. Ces principes n’ont pas été acceptés par les parties, qui restent attachées à leurs revendications territoriales et identitaires.