Ariel Sharon est l’un des personnages les plus marquants de l’histoire d’Israël. Général de renom, ministre de plusieurs portefeuilles, fondateur du parti Kadima et Premier ministre de 2001 à 2006, il a joué un rôle clé dans les guerres israélo-arabes, la politique de colonisation et le retrait unilatéral de la bande de Gaza. Il est aussi l’un des dirigeants israéliens les plus controversés, accusé de responsabilité indirecte dans le massacre de Sabra et Chatila et de provoquer la seconde Intifada par sa visite sur l’esplanade des Mosquées. Retour sur la vie et l’œuvre d’Ariel Sharon, surnommé “Arik”, “le Lion du désert” ou encore “le Bulldozer”.
Le feu de la jeunesse : les premiers pas d’Ariel Sharon vers un Israël indépendant
Ariel Sharon est né le 26 février 1928 à Kfar Malal, un village agricole situé au nord de Tel-Aviv, dans la Palestine sous mandat britannique. Ses parents sont des immigrants juifs originaires de Biélorussie, qui ont fui les pogroms et l’antisémitisme en Europe. Ariel grandit dans une atmosphère sioniste et nationaliste, bercé par les récits de son père sur les combats contre les Arabes et les Britanniques. Il reçoit une éducation religieuse et apprend l’hébreu, le yiddish et le russe.
Voici une vidéo présentant cet homme politique :
Dès son adolescence, il s’engage dans la lutte pour la création d’un État juif. Il rejoint la Haganah, l’organisation paramilitaire juive, à l’âge de 14 ans. Il participe à des opérations de sabotage et de renseignement contre les forces britanniques et arabes. En 1947, il devient commandant d’une section de la brigade Alexandroni, qui combat pendant la guerre israélo-arabe de 1948-1949. Il est blessé à plusieurs reprises au cours du conflit, qui aboutit à la proclamation de l’indépendance d’Israël.
Du courage inébranlable à la reconnaissance mondiale : la saga héroïque d’Ariel Sharon
Après la guerre, Ariel Sharon poursuit sa carrière militaire au sein de l’armée israélienne. Il se distingue par son audace, son charisme et son sens tactique. Il est le fondateur et le chef de l’unité 101, une unité spéciale chargée de mener des raids de représailles contre les infiltrations arabes en Israël. En 1953, il dirige l’opération Shoshana, qui fait plus de 60 morts dans le village jordanien de Qibya. L’attaque provoque un tollé international et est condamnée par l’ONU.
En 1956, il participe à la guerre de Suez aux côtés des forces françaises et britanniques. Il commande une brigade parachutiste qui traverse le désert du Sinaï et atteint le canal de Suez. Il est décoré pour son exploit militaire. En 1967, il est nommé général et prend le commandement du front sud lors de la guerre des Six Jours. Il joue un rôle décisif dans la conquête du Sinaï égyptien.
En 1973, il est rappelé du service actif pour participer à la guerre du Kippour. Il commande une division blindée qui traverse le canal de Suez et encercle la troisième armée égyptienne. Il contribue ainsi à renverser le cours de la guerre en faveur d’Israël. Il devient un héros national et acquiert une grande popularité.
Du champ de bataille à la scène politique : la transformation de Ariel Sharon en maître politique
Après sa retraite militaire en 1974, Ariel Sharon se lance dans la politique. Il cofonde le parti Likoud, qui rassemble les forces nationalistes et conservatrices opposées au Parti travailliste. Il est élu député à la Knesset en 1977 et devient ministre de l’Agriculture dans le gouvernement de Menahem Begin. Il est le principal promoteur de la politique de colonisation des territoires occupés en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Il affirme que ces territoires font partie du “Grand Israël” et qu’ils sont nécessaires à la sécurité d’Israël.
En 1981, il devient ministre de la Défense. Il est l’architecte de l’invasion du Liban en 1982, qui vise à chasser l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) de Beyrouth. L’opération, baptisée “Paix en Galilée”, se transforme en une guerre longue et coûteuse, qui fait des milliers de victimes civiles. En septembre 1982, Ariel Sharon est impliqué dans le massacre de Sabra et Chatila, un camp de réfugiés palestiniens à Beyrouth, où des milices chrétiennes libanaises alliées à Israël tuent entre 800 et 3 500 personnes. Une commission d’enquête israélienne conclut à la responsabilité indirecte d’Ariel Sharon, qui aurait laissé faire les massacres. Il est contraint de démissionner de son poste de ministre de la Défense.
Ariel Sharon reste cependant un acteur influent de la scène politique israélienne. Il occupe plusieurs postes ministériels dans les gouvernements successifs du Likoud, notamment celui des Affaires étrangères de 1998 à 1999. Il continue à soutenir la colonisation et à s’opposer aux accords de paix avec les Palestiniens.
De la répression à la fondation du parti centriste : la transformation politique d’Ariel Sharon
En 1999, Ariel Sharon devient le chef du Likoud, après la défaite du Premier ministre Benyamin Netanyahou face au travailliste Ehud Barak. En septembre 2000, il provoque un séisme politique en se rendant sur l’esplanade des Mosquées à Jérusalem-Est, un lieu saint pour les musulmans et les juifs, accompagné d’un important dispositif sécuritaire. Sa visite est perçue comme une provocation par les Palestiniens, qui déclenchent la seconde Intifada, une révolte populaire contre l’occupation israélienne.
En février 2001, Ariel Sharon remporte largement l’élection au poste de Premier ministre face à Ehud Barak. Il forme un gouvernement d’union nationale avec le Parti travailliste. Il adopte une ligne dure face à l’Intifada, qu’il réprime par la force militaire. Il ordonne l’assassinat du chef du Hamas Ahmed Yassine en 2004 et le retrait des troupes israéliennes de la bande de Gaza en 2005. Il rompt avec le Likoud et fonde le parti Kadima, qui se veut centriste et pragmatique.
En janvier 2006, Ariel Sharon est victime d’une grave attaque cérébrale qui le plonge dans le coma. Il est remplacé par son adjoint Ehud Olmert, qui remporte les élections législatives de mars 2006. Ariel Sharon reste dans le coma jusqu’à sa mort, le 11 janvier 2014.
L’héritage complexe : l’impact durable d’Ariel Sharon
Ariel Sharon laisse derrière lui un bilan contrasté. Il est considéré par ses partisans comme un grand homme d’État, qui a défendu les intérêts d’Israël avec courage et détermination. Il est salué pour avoir pris des décisions difficiles, comme le retrait de Gaza ou la création du parti Kadima, qui ont ouvert la voie à une possible solution au conflit israélo-palestinien.
Il est en revanche détesté par ses adversaires, qui lui reprochent ses crimes de guerre, sa politique expansionniste et son mépris du droit international. Il est vu comme un obstacle à la paix et à la justice, qui a alimenté la haine et la violence entre les peuples. Il est surnommé “le Boucher de Beyrouth” par les Arabes et “le Roi d’Israël” par ses détracteurs israéliens.
Ariel Sharon reste une figure emblématique et controversée de l’histoire d’Israël. Il a marqué son époque par sa personnalité forte, son parcours exceptionnel et ses choix stratégiques. Il a changé le visage d’Israël et influencé le destin du Moyen-Orient.